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Quand les bombardements à Gaza touchent l’édition scientifique

Michael Eisen, dans le laboratoire du campus de l’université de Californie à Berkeley (Etats-Unis), le 3 février 2017.

L’onde de choc de la guerre Israël-Hamas n’en finit pas de s’étendre. L’édition scientifique, qui pouvait se croire à l’abri des secousses, se voit à son tour touchée. Le rédacteur en chef de la revue scientifique eLife, Michael Eisen, a été démis de ses fonctions le 24 octobre à la suite d’une publication sur X (ex-Twitter) controversée. La décision prise par le conseil d’administration a provoqué une vive polémique au sein de la publication, mais aussi plus largement dans le milieu de la recherche, où de nombreuses voix se sont émues d’une remise en cause de la liberté d’expression.

Tout a commencé le 13 octobre. Le professeur de biologie de l’université de Californie à Berkeley (Etats-Unis), aux manettes de la revue depuis 2019, retweete sur son compte personnel un article du journal satirique The Onion consacré aux bombardements à Gaza. Son titre en donne bien la tonalité : « Des Gazaouis mourants critiqués pour ne pas avoir condamné le Hamas dans leurs derniers mots. » « Bingo ! », commente-t-il. Dans la foulée, il rédige un second tweet : « The Onion parle avec plus de courage, de perspicacité et de clarté morale que les dirigeants de toutes les institutions universitaires réunies. J’aimerais qu’il y ait une université The Onion. »

Rapidement, la polémique enfle le réseau social, caisse de résonance de toutes les passions tristes. Quelques scientifiques israéliens annoncent qu’ils ne soumettront plus d’articles à la revue tant que Michael Eisen en dirigera la rédaction. Ce qui conduit d’abord le comité de la revue à prendre ses distances avec le tweet incriminé. Puis, le 24 octobre, la direction annonce le « remplacement » de son rédacteur en chef. Motif avancé : « Son approche du leadership, de la communication et des médias sociaux a, à certains moments-clés, nui à la cohésion de la communauté que nous essayons de construire et, par conséquent, à la mission d’eLife. » Le tweet ne serait qu’une « nouvelle manifestation de son comportement ».

Il est vrai que Michael Eisen n’est pas à proprement parler un chantre du consensus. Biologiste moléculaire reconnu, il a acquis une grande partie de sa célébrité pour le combat qu’il mène, depuis vingt-cinq ans, contre le modèle dominant de l’édition scientifique, qui érige les revues en seules juges de la qualité des travaux et impose aux lecteurs un coût d’accès exorbitant. Avec deux autres chercheurs, il a d’abord créé le groupe PLOS, qui offre aux lecteurs un accès gratuit aux contenus publiés. Ce modèle alternatif, qui fait payer les frais de publication aux auteurs des articles, a connu un grand succès. Michael Eisen s’y est attiré quelques solides inimitiés.

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