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Quand des cellules de la truite s’autodévorent pour se préserver

Tête de truite arc-en-ciel.

Les cellules vivantes peuvent s’autodévorer. Ce processus d’autophagie (du grec « se manger soi-même ») leur permet non seulement de recycler et de renouveler leurs propres constituants, mais aussi de survivre à un stress. Le Japonais Yoshinori Ohsumi, qui a démontré les rouages de ce mécanisme dans les années 1990, a reçu le prix Nobel en 2016.

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Les cellules, au fond, ont inventé ici le tri sélectif et le recyclage de leurs déchets. En pratique, elles mettent en œuvre plusieurs de ces circuits vertueux. Dans celui qui nous intéresse, des « camions-poubelles » (des protéines chaperons) reconnaissent d’abord les protéines à dégrader – celles qui sont devenues inutiles, défectueuses ou toxiques. C’est la première étape. Ensuite, ces camions les collectent et les acheminent jusqu’aux centres de traitement des déchets de la cellule : les lysosomes. Là, ces protéines périmées seront dégradées par des enzymes. Leurs briques élémentaires (les acides aminés) pourront ensuite être réutilisées pour fabriquer un stock tout neuf de protéines fonctionnelles.

On a longtemps cru que seules les cellules de mammifères et d’oiseaux étaient capables de pratiquer l’autophagie. Mais ce dogme a été revu en 2020, quand une équipe de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) et de l’université de Pau et des pays de l’Adour, a découvert cette aptitude chez un petit poisson asiatique, le médaka.

« La truite, un modèle naturel d’intolérance au glucose »

La truite aussi a recours à ce processus d’autodigestion, montre aujourd’hui cette équipe. « L’autophagie existe probablement chez tous les poissons. C’est donc un phénomène bien plus ancien qu’on ne le pensait », relève Iban Seiliez, qui a coordonné ce travail publié le 5 octobre dans la revue Autophagy.

Surtout, ce mécanisme aide les cellules à résister à de fortes concentrations de glucose. « Comme d’autres poissons carnivores, la truite est un modèle naturel d’intolérance au glucose, cet état cellulaire présent chez les humains en situation de prédiabète », explique Emilio Vélez, premier auteur de l’étude. En clair, la truite, qui se nourrit essentiellement de protéines, n’est pas outillée pour faire face à de fortes quantités de sucre.

Que se passe-t-il dans les cellules de ce salmonidé, soumises à de forts taux de glucose ? Les chercheurs ont suivi le processus à l’aide d’une sonde fluorescente couplée à « l’étiquette » (une courte séquence d’acides aminés) qui marque les protéines à dégrader. Et voici la cascade d’événements qu’ils ont retracée. L’excès de sucre entraîne d’abord un dysfonctionnement des mitochondries, ces usines à énergie des cellules. Ce stress provoque l’oxydation de nombreuses protéines ; un gène-clé (Lamp2A) s’active alors et déclenche cette forme d’autophagie. Finalement, les protéines oxydées seront dégradées dans les lysosomes.

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