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L’Antarctique en quête d’aires marines protégées

Une colonie de manchots à jugulaire (« Pygoscelis antarcticus ») sur un iceberg au large des îles Orcades du Sud, en Antarctique, le 9 mars 2023.

L’Antarctique a beau se réchauffer à un rythme deux fois supérieur au reste du monde et la superficie de la banquise rétrécir autour du pôle Sud, la Commission pour la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR, selon son appellation anglaise) risque, cette année encore, de se distinguer par son immobilisme.

Comme chaque automne, cette organisation, forte de vingt-sept Etats membres et accueillant dix pays observateurs, se réunit à Hobart, en Australie. Après une première semaine durant laquelle se sont tenus des comités scientifiques, les délégations débattent en assemblée plénière jusqu’au 27 octobre d’éventuelles nouvelles mesures de préservation du continent blanc et de ses ressources vivantes. A ce titre, la CCAMLR fixe notamment des règles encadrant la pêche au krill, un petit crustacé à la base de l’alimentation des manchots et des mammifères marins, à la légine (pour deux espèces : Dissostichus eleginoides et Dissostichus mawsoni), au poisson des glaces, au calmar et au crabe.

Instaurer un réseau d’aires marines protégées constitue l’une de ses raisons d’être. La première mise en place de l’une d’entre elles, en 2009, a eu lieu au sud des îles Orcades. La dernière-née, celle de la mer de Ross, un immense sanctuaire de 1,12 million de kilomètres carrés, avait été obtenue au bout de cinq ans de négociations et remonte à 2016. Voilà donc sept ans que tout projet est bloqué, car les décisions de la commission sont prises par consensus. Mais, depuis lors, Moscou et Pékin se sont montrés réticents.

« La clé, la diplomatie présidentielle »

La déclaration des chefs d’Etat du G20, à New Delhi, le 10 septembre, mentionnait toutefois expressément leur « soutien » à la CCAMLR afin de « mettre en place un système représentatif d’aires marines protégées reposant sur les données scientifiques les plus fiables ». Cet engagement est a priori cautionné par l’Australie, la Chine, la France, l’Inde, le Japon, la Norvège, la Russie, l’Union européenne, qui sont tous membres aussi de la commission qui veille sur l’Antarctique.

Sur cette photographie diffusée par l’ONG Sea Shepherd Global, le bateau norvégien Antarctic Endeavour pêche du krill alors qu’une baleine fait surface pour se nourrir, en Antarctique, le 6 mars 2023.

« Les progrès dans la protection des écosystèmes vitaux de l’Antarctique se sont enlisés, analyse Emil Dediu, pour le Pew Bertarelli Ocean Legacy. Pourtant, il serait aujourd’hui urgent de prendre en compte le changement climatique dans les décisions. Le continent blanc est en train de changer avec la modification du pH de l’océan et la montée des eaux, la fonte des glaces, les espèces invasives qui se rapprochent. » La fondation Pew est partie prenante, aux côtés des Amis de la Terre, de Conservation International, de Greenpeace et du WWF entre autres, d’un regroupement d’ONG, l’Antarctic and Southern Ocean Coalition, qui dispose d’un statut d’observateur à Hobart. Elle redoute l’absence de progrès notables, compte tenu des résultats décevants de la réunion de la CCAMLR entièrement consacrée aux aires marines protégées qui s’est tenue en juin au Chili. « Elle n’a abouti à aucune feuille de route, rapporte Emil Dediu. La clé à la CCAMLR, c’est la diplomatie présidentielle. Barack Obama en personne avait discuté directement avec ses homologues de Pékin et Moscou pour obtenir la protection de la mer de Ross en 2016. Il ne faut pas perdre espoir : le traité de l’Antarctique n’a-t-il pas été signé en 1959, en pleine guerre froide ? »

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