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Manifestation contre le projet d’autoroute A69 : le cortège principal défile dans le calme, plusieurs sites privés envahis

Des black blocs se heurtent aux forces de l’ordre, lors de la manifestation contre le projet d’autoroute A69, à Saïx (Tarn), le 21 octobre 2023.

Des milliers d’opposants au projet d’autoroute A69 entre Toulouse et Castres ont manifesté samedi 21 octobre aux abords de Castres. La mobilisation baptisée « Ramdam sur le macadam » a réuni plus de 10 000 personnes, selon les organisateurs. La préfecture a quant à elle fait état de 2 400 manifestants dans le cortège principal, et de « 2 500 individus violents ». La manifestation s’est scindée en plusieurs cortèges au fil de l’après-midi.

Les organisateurs – La voie est libre, Les Soulèvements de la Terre, le Groupe de lutte anti-macadam, la Confédération paysanne, Extinction Rebellion Toulouse, Attac, le Groupe national de sauvegarde des arbres et Solidaires 81, ces deux dernières organisations ayant déposé un parcours en préfecture – avaient pris soin de brouiller les pistes. Six cortèges sont partis du camp de base, non loin de Saïx (Tarn), dont cinq sur des parcours qui n’avaient pas été déposés.

L’objectif du cortège le plus « déterminé » était une cimenterie de la société Carayon, un site qui n’était pas protégé par les forces de l’ordre. C’est le cortège « rouge », au nom de code « économie locale », composé de quelque 2 000 personnes – chaque cortège était différencié par des drapeaux de couleur et répondait à des appellations diverses comme « utilité publique », « décarbonation » ou encore « désenclavement » –, qui était chargé de pénétrer sur le site du cimentier. Après une marche sportive sur chemins et routes, les manifestants ont forcé le portail de la cimenterie pour y taguer des slogans hostiles à l’A69, et déployer une grande banderole « No macadam » sur une centrale à béton, une grande cuve en métal.

Deux entreprises ciblées par des opposants

Incendie d’un camion-citerne au niveau d’une cimenterie, en marge de la manifestation contre le projet d’autoroute A69, à Saïx (Tarn), le 21 octobre 2023.

Trois camions toupies ont été incendiés. Selon les organisateurs, cela n’était pas prévu. La préfecture, dans son communiqué de fin de journée, explique que « des individus hostiles ont dégradé une cimenterie, y déclenchant un incendie ». « Après avoir été entravés par les manifestants, qui ont été repoussés par les forces de l’ordre, les sapeurs-pompiers sont intervenus sur le lieu de l’incendie », avancent ensuite les autorités. Selon le journaliste du Monde présent sur place, aucun contact n’a cependant eu lieu avec les forces de l’ordre ou avec les pompiers, les manifestants ayant quitté les lieux bien avant que les véhicules de secours ou de gendarmes ne s’approchent du site.

Bardou, une autre entreprise tarnaise du BTP, à Cambounet-sur-le-Sor, qui intervient sur le chantier de l’A69, a aussi été prise pour cible par des opposants, selon une porte-parole d’Atosca. Des individus se sont « introduits par effraction sur le site », a confirmé la préfecture, ajoutant qu’ils avaient « pris son vigile à partie, dégradé le bâtiment et arraché ses clôtures, avant d’être repoussés par les forces de l’ordre ». Selon la préfecture, les gendarmes ont tiré soixante-quatorze grenades pour « repousser la menace, sans donner lieu à une confrontation directe ». Deux policiers ont par ailleurs été légèrement blessés, selon la préfecture, qui fait aussi état d’un manifestant pris en charge par les secours pour une entorse au genou.

Dans le cortège principal, des milliers de personnes – 2 400 selon la préfecture du Tarn – ont défilé sur le parcours autorisé, une boucle d’environ 5 kilomètres, dans une atmosphère joyeuse et paisible, et devant des commerces au rideau baissé. Fanfares, batucada, perruques et déguisements multicolores, tracteurs qui klaxonnent et pancartes plus ou moins inventives (« Stop A69 », « Le 69 oui, l’A69 non », « Plus de moisson, moins de béton », « Aux arbres citoyens ») ont constitué le décor d’une marche à laquelle ont participé beaucoup d’enfants, comme la fille d’Elvia, 10 ans, ou celles de Sandrine, 7 et 10 ans.

Les fillettes « voient qu’on abat des arbres tous les trois jours, et elles ont compris qu’une usine à bitume allait être implantée à 1 kilomètre de leur école, expliquent ces deux quadragénaires venues du village de Saint-Germain-des-Prés, que la future A69 doit couper en deux. Alors ce sont presque nos enfants qui veulent venir manifester et nous qui les suivons ». L’éventualité de débordements – finalement presque inexistants – ne les a jamais dissuadées de venir : « On sait qu’il y a des gens très en colère, et on est en colère nous aussi, mais on voulait que nos enfants voient ça, et on savait qu’il y aurait un cortège fait pour nous. » A 16 h 30, le cortège avait regagné le camp de base d’où il était parti en début d’après-midi, et où la mobilisation doit se poursuivre jusqu’à dimanche soir.

Mille six cents policiers et gendarmes déployés

« On est plus déterminés que jamais, on ne veut pas du futur auquel ils nous condamnent, notre mot d’ordre, c’est “Amour et rage, no macadam !” », déclarait plus tôt lors d’un point presse Amalia, d’Extinction Rébellion Toulouse, l’un des collectifs qui appelaient à la mobilisation contre l’A69 ce week-end. S’appuyant sur un sondage IFOP réalisé il y a quelques jours auprès de la population du Tarn et de la Haute-Garonne, Gilles Garric, du collectif La Voie est libre, soulignait que 61 % des sondés étaient favorables à l’abandon du projet d’autoroute et qu’ils étaient 82 % à se prononcer pour un référendum local.

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Après une courte suspension en fin de semaine, le chantier de l’A69, portion d’autoroute qui réduirait d’environ vingt minutes le trajet entre Castres et Toulouse et doit être mise en service en 2025, a repris dès lundi, le gouvernement se disant « déterminé à faire aboutir ce projet, qui a été décidé démocratiquement et confirmé systématiquement par le juge ». Les opposants estiment quant à eux que tous les recours juridiques n’ont pas été purgés et pensent que le projet peut encore être abandonné, en s’appuyant pour fonder leur espoir sur le succès de la mobilisation contre l’aéroport à Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique).

Quelque 1 600 policiers et gendarmes étaient déployés pour cette mobilisation, selon la préfecture, soit deux fois plus que lors d’une précédente manifestation contre l’A69 au printemps dernier. La mobilisation doit se poursuivre jusqu’à dimanche soir.


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