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La Grèce reconstruit péniblement son économie, après quinze ans de dépression

Au ministère des finances grec, on attendait la nouvelle avec impatience. Vendredi 20 octobre au soir, l’agence de notation Standard & Poor’s (S&P) a annoncé la décision tant attendue : la note de la Grèce est passée de BB+ à BBB−. Un geste technique, mais extrêmement symbolique : treize ans après avoir été abaissée au statut de junk bond (« obligation pourrie »), c’est-à-dire la catégorie la plus risquée, la Grèce revient officiellement dans la catégorie investment grade (« catégorie “ investissable ” »). « C’est essentiellement symbolique, reconnaît Georges Christopoulos, le secrétaire général du ministère des finances, mais je ne crois pas qu’un autre pays ait réussi à y revenir aussi rapidement. »

Après une dépression historique, pendant laquelle l’économie grecque s’est effondrée de 28 %, Athènes semble enfin avoir tourné la page. Il y a eu d’abord la crise (2008-2016), puis la stabilisation (2017-2020) et, depuis la sortie de la pandémie, le retour de la croissance. Cette année, malgré l’inflation qui a rogné le pouvoir d’achat, elle devrait atteindre 2,5 %. Quant au chômage, qui a culminé à 28 % en 2013, il est redescendu à 11 %.

« Ah bon, l’économie grecque va mieux ? », s’étonne Giorgia Tabaki, en cette mi-octobre. L’histoire de cette quadragénaire aux lunettes cerclées de métal raconte le long appauvrissement des Grecs depuis quinze ans. En 2008, elle parcourait la Grèce pour s’occuper de la décoration des vitrines de magasins de salles de bains. Grâce à de généreuses commissions sur les ventes, elle gagnait près de 4 000 euros net par mois.

Deux ans plus tard, avec la crise, elle a perdu son emploi. Elle travaille dans une chaîne de supermarchés et perçoit 1 900 euros net par mois. « J’ai tout changé : mon appartement, ma façon de consommer, ma vie… » A cause de son travail, elle a développé des problèmes de tendinites dans les bras et elle a dû arrêter cet été. Elle est désormais chauffeuse de taxi. « C’est vrai, l’économie va mieux qu’en 2022, mais ça va beaucoup moins bien qu’il y a quinze ans. »

Sophia Soropidou, 77 ans, sur un marché aux fruits à Athènes, le 17 octobre 2023.

« Pire que la dépression américaine de 1929 »

Les statistiques lui donnent raison. Aujourd’hui, l’économie grecque demeure 20 % au-dessous de son pic de 2007 (en comparaison, la zone euro est 12 % au-dessus). « Ce que la Grèce a vécu est pire que la dépression américaine de 1929, rappelle Dimitri Papalexopoulos, le président de SEV, le patronat grec. La chute de l’économie a été similaire [28 % en Grèce, 29 % aux Etats-Unis], mais ça a duré plus longtemps [quatre ans aux Etats-Unis, 1929-1933, huit ans en Grèce, 2008-2016]. » En 2007, le produit intérieur brut (PIB) grec par habitant atteignait les trois quarts de celui de la France ; aujourd’hui, il est d’un peu plus de la moitié.

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