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« “Homo sapiens” pourrait être arrivé en Amérique il y a 20 000, 30 000, voire 40 000 ans »

Des peintures préhistoriques sur une paroi rocheuse dans le parc national de la Serra da Capivara dans l’Etat du Piaui (Nordeste, Brésil), le 21 août 2023.

Journaliste scientifique pour la revue brésilienne Piaui, Bernardo Esteves, 47 ans, publie en octobre le livre Admiravel novo mundo (« admirable nouveau monde », non traduit, Companhia das Letras), consacré à l’histoire de l’occupation des Amériques par Homo sapiens. Résultat de recherches approfondies, l’ouvrage explore des théories et controverses liées à ce sujet brûlant.

Pourquoi avoir décidé d’écrire un ouvrage sur ce sujet ?

L’occupation des Amériques est le dernier chapitre de la conquête de la planète par l’humanité. Et, malgré cela, il reste un sujet sur lequel les scientifiques ont peu de certitudes et d’innombrables polémiques ! Il était donc important de faire le point. Plus largement, il s’agissait aussi de redonner toute leur place, leur histoire et leur généalogie aux peuples indigènes, premiers occupants du continent, pratiquement exterminés pendant la colonisation européenne et largement ignorés par les chercheurs étudiant l’occupation des Amériques.

Jusqu’à récemment prédominait la théorie dite « de Clovis » pour dater l’occupation des Amériques. De quoi s’agit-il ?

La théorie du peuplement tardif, dite « de Clovis », se fondait sur la découverte, effectuée à Clovis (Nouveau-Mexique), en 1932, d’outils en forme de pointe, très aboutis, datés d’il y a 13 000 ans. A partir de cela, les archéologues américains ont bâti une hypothèse expliquant qu’Homo sapiens serait arrivé en Amérique à pied depuis l’Asie à la même époque, en passant par le détroit de Béring, entre la Sibérie et l’Alaska, profitant alors d’un passage terrestre créé par la baisse du niveau des océans à la fin de la dernière glaciation.

Cette théorie rencontre un succès foudroyant. Elle devient un paradigme, un modèle, défendu bec et ongles par les universitaires américains, qui placent fièrement les Etats-Unis au cœur de l’histoire. C’est le règne du « Clovis first », ou « Clovis d’abord ». Toute hypothèse alternative est systématiquement balayée, mise en question et réprimée par les archéologues américains, organisés en une véritable « police de Clovis ».

Vous commencez pourtant votre livre par un chapitre intitulé « Requiem pour Clovis »…

Oui ! Car, à partir des années 1970, plusieurs sites archéologiques viennent esquinter le « Clovis first ». Il y a bien sûr les découvertes de la Serra da Capivara, mais le site qui a vraiment déboulonné ce paradigme est celui de Monte Verde, dans le sud du Chili. On y retrouve des vestiges extrêmement bien conservés d’occupation humaine datés d’il y a 14 600 ans. Mille ans avant Clovis ! Depuis, d’autres sites, un peu partout, suggèrent qu’Homo sapiens pourrait être arrivé en Amérique bien avant cela, il y a 20 000, 30 000, voire 40 000 ans…

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