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« C’était mieux avant ? » : au théâtre, un procès fictif oppose les boomers à la génération Z

Juliette Ray et Juliette Hamma, organisatrices du procès générationnel, sur la scène du théâtre Antoine à Paris.

« Qui, des jeunes ou des vieux, peut faire dévier le paquebot avant le naufrage ? » Bras ouverts sous les projecteurs, une silhouette habillée en noir se dessine. Flora Ghebali, avocate générale, s’adresse à des jurés et à une assemblée. Solennelle, elle requiert des peines pour les deux « accusés » du soir, qui ne sont autres que deux générations que cinquante ans séparent. « Aux vieux, je reproche leur trop grande légèreté, le refus d’accepter qu’ils ont eu tort. Aux jeunes, leur trop grande lourdeur et leur pureté militante. » Drôle de réquisitoire pour une procureure. C’est que Flora Ghebali, jeune entrepreneuse et essayiste n’est pas une vraie avocate, et le jury, assis à deux tables aux extrémités de la scène, n’a rien d’une vraie cour d’assises.

Un procès atypique se tient ce soir d’octobre au théâtre Antoine, dans le 10e arrondissement de Paris. Sur le banc des accusés, deux générations : les « boomers » et les « gen Z » (génération Z). Les premiers sont les « baby-boomers » d’après-guerre, nés entre 1946 et 1964 ; les seconds sont les jeunes adultes et adolescents d’aujourd’hui, nés entre 1996 et 2010. Les boomers ont d’abord été catégorisés comme tels par les plus jeunes sur les réseaux sociaux, à travers l’expression « OK, boomer » lancée en 2019 par une députée néo-zélandaise. Une manière pour la nouvelle génération de prendre la parole et de revendiquer des idées plus progressistes que celles de ses aînés.

Pour Juliette Ray, 23 ans et coorganisatrice de l’événement, le constat est clair : le dialogue entre ces générations est aujourd’hui compliqué. « Arrêtons de faire le procès d’une génération Z pleurnicharde, arrêtons d’accuser les boomers de tous les maux… Mettons-nous sur une scène et débattons, loin des réseaux sociaux », propose l’étudiante en master d’entrepreneuriat à l’ESCP.

Sur scène, des avocats ténors du barreau ou jeunes prodiges, représentants des deux générations, viennent s’exprimer sur de grands thèmes de société. La liberté et l’écologie, c’était mieux avant ? L’art et l’autorité, mieux aujourd’hui ? Mauvaise foi et ironie sont au rendez-vous, mais chacun instaure avec humour et intelligence les conditions d’un dialogue intergénérationnel. Avec une difficulté supplémentaire : les plus jeunes doivent défendre l’époque révolue des boomers, les plus âgés se faire les chantres de l’air du temps.

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Imaginé lors d’un repas de famille

L’idée de cette mise en scène a germé lors d’un banal repas de famille. Un père, Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit émérite à l’université Paris-I Panthéon Sorbonne et sa fille, Juliette, que cinquante ans séparent, débattaient pour la énième fois des sujets de société qui les opposent. « Sur le mouvement #metoo, les débats environnementaux… j’ai le sentiment qu’aujourd’hui, la rupture générationnelle est particulièrement marquée », remarque Juliette Ray. Pour le père, les attaques faites à sa génération sont souvent injustifiées. Mais les deux partagent la conviction que la discussion est toujours possible. « C’est la mentalité de la famille, soutient en riant Jean-Emmanuel Ray. On cherche à rassembler, pas à cliver. »

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