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Atos : récit d’un crash, des années Breton au démantèlement

Dans le centre technique opérationnel de l’entreprise Atos, chargé de l’informatique pour les Jeux olympiques 2024, à Paris, le 3 octobre 2023.

En temps normal, la nouvelle aurait été célébrée. Le 4 octobre, le groupe d’informatique Atos a décroché Jupiter, un contrat de 500 millions d’euros pour la fabrication, avec l’allemand ParTec, d’un supercalculateur, le plus puissant jamais livré en Europe, pour le centre de recherche Jülich en Allemagne. Mais, le cœur n’y est pas. Atos broie du noir : valse des dirigeants – un nouveau directeur général, le troisième depuis 2021, Yves Bernaert, a été nommé jeudi 5 octobre –, plan de démantèlement, pressions politiques, contestation d’actionnaires, effondrement du cours de Bourse… Rien ne va.

« Peu de monde s’intéressait à nous autrefois. Là, on est presque devenus un sujet de divertissement, on est le Paris Match du monde des affaires », soupire un cadre, qui, comme la plupart de nos interlocuteurs, demandera l’anonymat. Pas un jour sans que les 10 000 salariés du groupe en France – 90 000 dans le monde – découvrent un nouvel article dans la presse. Les clients les lisent aussi, les concurrents s’en délectent, ce qui n’aide pas le travail des équipes. « Avec tout ce bruit, ça devient compliqué de gagner de nouveaux contrats », s’inquiète le dirigeant d’une des divisions du groupe qui, comme beaucoup de monde, s’interroge sur les raisons de cette descente aux enfers.

Comment une entreprise de 11 milliards d’euros de chiffre d’affaires a-t-elle pu faire fondre sa valeur, en seulement deux ans, de 5 milliards d’euros à 588 millions d’euros ? Et pourquoi un groupe dont une partie des activités – les supercalculateurs justement – sont essentielles à la dissuasion nucléaire française finit-il par tomber entre les mains de Daniel Kretinsky ? Le 1er août, en plus d’être prêt à lui céder les activités d’infogérance (Tech Foundations), à des conditions financières jugées trop favorables selon plusieurs actionnaires mécontents, le conseil d’administration d’Atos a accepté d’engager des négociations exclusives avec l’homme d’affaires tchèque pour lui réserver une place au capital de la division regroupant cybersécurité et supercalculateurs (Eviden).

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Politique d’acquisitions effrénée

Pour comprendre cette dérive, il faut remonter aux racines du mal. Nous sommes fin 2008. Un nouveau PDG arrive : Thierry Breton, l’actuel commissaire européen au marché intérieur. Après deux années aux gouvernements Raffarin et Villepin, comme ministre de l’économie, l’ancien PDG de France Télécom veut goûter de nouveau aux frissons des affaires. Il nourrit de grandes ambitions pour Atos : faire de ce petit prestataire de services informatiques un leader mondial. « Le groupe n’avait pas accès aux grands marchés. Pour cela, il devait absolument grossir », justifie un administrateur de l’époque.

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