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Jean Pisani-Ferry : sur la planification écologique, « Emmanuel Macron a manqué l’occasion d’un récit mobilisateur »

La planification a partie liée avec la rareté. Dans une économie abîmée par la guerre, c’est la pénurie de ressources productives qui avait conduit à mettre en place le Plan, et c’est l’abondance retrouvée qui avait progressivement mené à son abandon. C’est aujourd’hui la rareté des ressources naturelles – climat, biodiversité, eau – qui motive la renaissance de la démarche planificatrice. Nous sommes entrés dans une nouvelle économie de la pénurie.

Les économistes ont longtemps cru que la réponse au défi climatique passait par la seule tarification du carbone. Et il est vrai que celle-ci garantirait l’efficience économique. Mais, sans même parler de faisabilité politique, la fiscalité carbone ne suffit pas à guider l’effort collectif. Programmer le durcissement des interdictions de location des passoires thermiques ou bannir la mise sur le marché des véhicules thermiques à partir de 2035, c’est signaler, mieux que par l’annonce d’une trajectoire future de prix, l’ampleur de la transformation que nous devons engager.

Petit à petit, les contours de la planification écologique se dessinent. Ont ainsi été fixés, secteur par secteur, des objectifs précis de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030, en cohérence avec la cible de neutralité climatique à l’horizon 2050 (« Mieux agir : la planification écologique », septembre 2023). Par exemple, on sait désormais que le gouvernement compte faire passer la part des résidences principales chauffées au fioul de 11 % en 2021 à 3,6 % en 2030, qu’il vise parallèlement à multiplier par dix les déplacements en covoiturage ou encore qu’il veut inverser la tendance au déclin de la part modale du fret ferroviaire pour la faire remonter de 10 % aujourd’hui à 18 % en 2030.

Une écologie de l’offre

Enoncer de tels objectifs est important, parce que cela indique où doit porter l’effort et rend le gouvernement comptable des écarts entre ambitions et résultats. Mais cela ne suffit pas. « Mieux agir » est, d’abord, un document de consultation, qui doit encore être traduit dans des textes législatifs ou réglementaires pour avoir valeur d’engagement. Si des mesures ont été prises et des financements annoncés, l’identification des politiques publiques qui produiront les résultats attendus reste encore incomplète. Les stratégies de décarbonation du passé ont trop souvent misé sur la puissance performative du verbe.

Manque enfin la programmation des moyens associés, au-delà de l’année 2024. Dix milliards d’euros d’autorisations d’engagement, dont environ 8 milliards pour le climat, c’est évidemment un effort sans précédent, d’autant plus remarquable qu’il intervient dans un contexte budgétaire tendu. Mais c’est un effort qui devra être prolongé et amplifié pour atteindre les quelque 34 milliards d’euros de crédits publics requis pour financer la transition.

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