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Comment les banques européennes aident les géants du pétrole et du gaz à lever des milliards

C’est un bref communiqué financier aux allures de faire-part, envoyé le 26 avril. Var Energi « a le plaisir d’annoncer » la levée de 600 millions d’euros pour financer ses activités. Ce que la société pétrogazière norvégienne ne précise pas, c’est que plusieurs bonnes fées l’ont assistée, notamment quatre groupes bancaires français : Crédit agricole, Société générale et Natixis, qui ont coorganisé la transaction, ainsi que BNP Paribas, qui a joué un rôle administratif.

Travailler avec Var Energi, une entreprise dont l’activité est tournée à 100 % vers les énergies fossiles très émettrices de gaz à effet de serre, semble contradictoire avec l’engagement des banques de contribuer à atteindre les objectifs définis par l’accord de Paris. Cette collaboration est pourtant autorisée par leurs chartes d’engagements climatiques, puisqu’elle prend la forme d’une émission d’obligations financières : les banques ne prêtent pas directement leur argent, elles se contentent d’assister l’énergéticien à plusieurs niveaux pour qu’il emprunte auprès d’investisseurs privés. On parle alors de financement indirect.

Le Monde a collaboré avec une dizaine de médias européens, dont Investico, Follow the Money et The Guardian, pour lever le voile sur ce volet méconnu du financement des énergies fossiles. La conclusion de notre enquête, baptisée « Fossil Finance », est sans appel : quand un géant gazier ou pétrolier récolte des centaines de millions d’euros par des obligations financières, les banques européennes sont presque toujours de la partie.

Plus de 1 000 milliards d’euros depuis 2016

L’accord de Paris a acté, en décembre 2015, l’urgence à réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Les financements aux énergies fossiles ne se sont pourtant pas taris depuis. Entre janvier 2016 et juin 2023, pas moins de 1 011 milliards d’euros ont été levés par 307 grands pollueurs qui poursuivent l’expansion de leurs activités fossiles, grâce à l’émission de 1 666 obligations « grises ». Cette manne représente près de la moitié des financements du secteur, le reste provenant des prêts directs.

S’il est commun de renvoyer la seule responsabilité de ces financements aux banques asiatiques et américaines, les établissements européens sont bien au cœur de ce marché : 776 milliards d’euros, soit 77 % du total, ont été financés avec le concours d’au moins l’un d’entre eux, presque autant que pour leurs homologues américains (801 milliards). Les établissements français (Crédit agricole, BNP Paribas, Société générale et, dans une moindre mesure, Natixis) font partie des plus actifs en Europe à cet égard : ils sont impliqués dans un peu plus de la moitié des opérations (52 %).

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