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Le placozoaire, ce minuscule animal à l’origine de nos neurones

Image de microscopie confocale des noyaux de « Trichoplax sp. H2 », faussement colorée par la profondeur de l’image.

Avouons-le d’emblée : nous n’avions jamais entendu parler des placozoaires. Malgré des dizaines de chroniques consacrées à la vie animale, ni le nom ni l’existence même de cette bestiole ne nous étaient connus. L’aurions-nous même rencontrée que nous l’aurions très probablement rejetée hors du règne animal. Imaginez : voilà une créature de 1 à 3 millimètres, exclusivement marine, qui vit accrochée sur les rochers ou à la surface des algues. Arrondie ou allongée, elle n’a pas de forme définie, si ce n’est qu’elle est plate. S’il fallait la rapprocher d’un être vivant connu, on pencherait volontiers pour une amibe.

Sauf que c’est bel et bien d’un animal qu’il s’agit. Loin de l’unicellulaire précédemment nommé, les placozoaires abritent des milliers de cellules. Comme tous les animaux, ils disposent notamment de cellules épithéliales – celles de notre épiderme – et se déplacent de manière active, au moyen de cils. Pas de système respiratoire, ni digestif, toutefois. Pour s’alimenter, ils se collent à des morceaux d’algues, libèrent des enzymes qui vont dégrader leur cible. Puis ils l’absorbent par phagocytose. Dit autrement, ils digèrent avant d’avaler.

Le plus simple des animaux existants, en vérité. Et l’un des plus mal connus. Découvert en 1883 à l’aquarium de Graz, en Autriche, Trichoplax adhaerens était jusqu’à ces dernières années considéré comme la seule espèce de l’embranchement des placozoaires. L’embranchement est pourtant le premier niveau de séparation de l’arbre de la vie après le règne. Chaque embranchement compte donc des centaines, des milliers, parfois des millions d’espèces. Là, il n’y en avait qu’une. Depuis dix ans, trois nouvelles ont été décrites et quelques autres sont dans les tuyaux des scientifiques. Avec une dernière particularité que les placozoaires ne partagent qu’avec le groupe des éponges : l’absence de système nerveux.

Un type cellulaire très particulier

Seulement voilà : dans un article paru le 19 septembre dans la prestigieuse revue Cell, une équipe de scientifiques espagnols et allemands vient d’annoncer que la minuscule crêpe, ou plutôt son ancêtre, dont nous nous sommes séparés il y a environ 800 millions d’années, pourrait nous avoir fourni les composants de nos futurs neurones. Pour apporter ce résultat, l’équipe d’Arnau Sebé-Pedros, au Centre de régulation génomique de l’Institut de sciences et technologie de Barcelone, a accompli un travail d’analyse particulièrement méticuleux : non pas séquencer le seul génome, mais caractériser l’expression de tous les gènes dans chaque cellule. Elle est ainsi parvenue à mettre en évidence neuf grands types cellulaires. « Un travail impressionnant, tant dans la quantité que dans la qualité des données générées et les techniques de pointe utilisées, salue Michaël Manuel, professeur de biologie animale et d’évolution à Sorbonne Université. Et puis il y a leur découverte. »

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