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Maladie d’Alzheimer : les nouveaux traitements en questions

Lorsque Corine apprend, à 58 ans – il y a quatre ans –, qu’elle est touchée par la maladie d’Alzheimer, « c’est une claque très difficile à accepter ». « J’ai eu l’impression de perdre ma mémoire et tout ce que j’avais, c’était dramatique », se souvient-elle. « On a l’impression que notre vie nous échappe, que le meilleur est derrière, ajoute sa compagne. C’est venu petit à petit. Corine ne retrouvait pas la voiture, oubliait qu’elle avait mis une casserole d’eau à chauffer… »

Le diagnostic est posé à l’hôpital proche de chez elles, dans une commune de Seine-et-Marne, puis Corine est adressée à la Pitié-Salpêtrière (AP-HP), l’un des huit centres en France qui testent le lecanemab, un anticorps monoclonal, comparativement à un placebo. Son médecin, Nicolas Villain, neurologue à l’hôpital parisien, lui propose de participer à l’essai clinique international qui évalue ce nouveau médicament développé par les laboratoires japonais Eisai et américain Biogen, qui cible les plaques amyloïdes, des amas de protéines impliqués dans cette maladie neurodégénérative. Corine n’hésite pas à intégrer le protocole de recherche en septembre 2020. Elle doit faire une injection intraveineuse toutes les deux semaines et de nombreux examens : tests neurocognitifs, IRM, bilans sanguins… pour surveiller les effets indésirables. « On n’a rien à perdre », dit sa compagne.

En 2020, la photographe Axelle de Russé a suivi pour « Le Monde » la vie des résidents du « Village landais Henri Emmanuelli », une structure qui n’accueille que des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. A Dax, le 7 juilet 2020.
Chaque maison accueille entre 7 et 8 villageois. Une alcove devant chaque chambre permet aux résidents de déposer un objet personnel leur permettant de la retrouver plus facilement. A Dax, le 7 juillet 2020.

A l’issue de l’essai, qui dure dix-huit mois, elles apprennent que Corine reçoit bien le lecanemab, et sont « plutôt soulagées ». Elle poursuit aujourd’hui le traitement, comme les autres participants.

Ont-elles vu des améliorations ? « C’est compliqué de se rendre compte, car on ne sait pas comment ce serait sans médicament », constate sa compagne, enseignante. « La maladie, restée stable pendant un an, semble s’aggraver depuis quelques mois », ajoute-t-elle. « Je le ressens aussi, j’ai l’impression d’avoir plus d’hésitations, plus de difficultés à me repérer », dit Corine, qui se dit « angoissée », mais « [s’]adapte avec les moyens du bord ». A la retraite depuis deux ans, elle s’occupe de son jardin, de ses animaux, fait des mots croisés, des puzzles, lit, écoute de la musique…

Aux Etats-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) a autorisé la commercialisation du lecanemab (sous le nom de Leqembi) en juillet. L’Agence européenne des médicaments (EMA) examine le dossier, et pourrait se prononcer d’ici à la fin de l’année.

En réalité, c’est le deuxième anticorps monoclonal qui cible la protéine amyloïde à arriver sur le marché. Après près de vingt ans sans nouvelle molécule anti-Alzheimer, la FDA avait autorisé en juin 2021 l’aducanumab (sous le nom d’Aduhelm), également développé par Eisai et Biogen. Cette annonce avait suscité une vaste polémique, les experts étant divisés sur l’interprétation des résultats. Plusieurs d’entre eux, qui s’étaient prononcés contre sa commercialisation, ont démissionné sur fond de suspicions de collusion. L’EMA a, six mois plus tard, en décembre 2021, rendu un avis négatif. Un essai de phase 3 se poursuit toutefois.

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