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« Marcel Boiteux a réussi à faire admettre l’idée qu’un tarif de service public a pour mission de traduire les coûts dans les prix »

Marcel Boiteux, mort le 6 septembre, était tout à la fois une exception et exceptionnel. Une exception, car il fut successivement un économiste éminent et le dirigeant d’une très grande entreprise publique, EDF, un cas quasiment unique. Exceptionnel par son immense talent, doté de grandes capacités conceptuelles et, en même temps, se révélant un grand homme d’action, gérant avec succès EDF pendant vingt ans.

Le grand public pourrait ne retenir qu’il présida aux destinées d’EDF pendant toute la période où l’entreprise construisit, en un temps record, le parc nucléaire qui fournit encore la majeure partie du courant électrique de notre pays. Cela suffit à établir sa notoriété ainsi que la constance de son engagement en faveur de cette source d’énergie. Selon nous, d’autres enseignements plus atemporels sont à retenir de sa pensée et de son action.

D’abord, alors qu’il est de bon ton de se gausser de la théorie économique et de son usage des mathématiques, son œuvre et la réception au sein de son entreprise témoignent que la théorie économique peut être utile. La mathématisation d’un problème peut apporter une solution qui a une validité empirique et fonctionnelle. Cette solution ne pourrait pas être trouvée sans l’usage des mathématiques et sans un cadre théorique adéquat. Cela ne veut pas dire qu’il en est toujours ainsi. Tous les problèmes économiques ne sont pas solubles. Et toute l’économie mathématique n’est pas utile.

Maximiser le surplus collectif

Disciple de Maurice Allais (1911-2010), Prix Nobel d’économie en 1988, Marcel Boiteux savait que la notion de coût marginal, le coût de la dernière unité produite, est une notion centrale pour la gestion d’une entreprise publique et pour établir ses tarifs. Selon sa formule très parlante, « Les horloges sont faites pour dire l’heure, et les tarifs pour dire les coûts ».

Mais un ingénieur ne se contente pas d’une idée, au contraire du chercheur, il essaie de l’opérationnaliser, et l’application à la fourniture d’électricité présente un certain nombre de difficultés : l’électricité n’est pas stockable en grande quantité, la demande comporte un côté aléatoire – pensons aux variations brutales de température d’un jour à l’autre –, et elle connaît des pointes, et des creux.

Pendant la vingtaine d’années qu’il a passées au service des études économiques d’EDF, Marcel Boiteux a poursuivi avec succès l’objectif d’opérationnaliser le concept de coût marginal de développement (le coût marginal de long terme) et d’en déduire le tarif optimal, non pour maximiser les profits de l’entreprise, mais pour maximiser le surplus collectif.

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