Close

Alain Juppé : « J’aurais bien aimé être président de la République, mais enfin, je m’en suis remis »

Alain Juppé, dans sa résidence secondaire d’Hossegor (Landes), le 5 septembre 2023.

Ce mardi 5 septembre, dans la matinée, la mer était démontée ; il a préféré ne pas se baigner. Alain Juppé est resté prudemment sur la plage, à regarder les surfeurs glisser. Plus jeune, il prenait les vagues, allongé sur une planche sans jamais monter dessus, ce qu’il a toujours regretté, se promettant chaque été d’apprendre. « Maintenant, c’est trop tard », tranche-t-il, assis sur la terrasse de sa maison familiale des Landes, au bord du lac d’Hossegor.

Retiré de la vie politique depuis son entrée au Conseil constitutionnel, en 2019, l’ancien premier ministre, 78 ans, publie ses Mémoires, Une histoire française (Tallandier, 400 pages, 22,90 euros), en librairie jeudi. « Je m’y suis collé tout seul », précise-t-il au Monde. De fait, ce texte lui ressemble : à la fois classique, sec et corseté, d’un côté ; empreint d’une vraie sincérité, un peu gauche parfois, de l’autre.

Alain Juppé s’y montre sans concession envers lui-même, évoquant un « sentiment de supériorité qui confine à l’orgueil », cette réputation de « froideur » qui lui colle à la peau. « A l’école, je collectionnais les prix d’excellence, ça m’a conditionné, raconte-t-il. J’ai fini par croire que j’étais le meilleur, avant que Chirac ne le dise. J’ai renoncé à me battre pour faire comprendre que je suis une âme sensible. » Il sourit. Puis, évoquant une « timidité » qui ne l’a jamais quitté : « Il faut voir d’où je viens… »

« J’aime être reconnu, ça m’a mû »

Il se raconte comme un « gamin de Mont-de-Marsan », élevé dans une famille de la petite-bourgeoisie vivant en vase clos. Sa sœur et lui sont « choyés », mais l’ambiance familiale n’est pas légère pour autant. Possessive et exigeante, sa mère nourrit les plus grandes ambitions pour « Alain », qui fait des détours pour rentrer si par malheur, en classe, il n’arrive pas premier. « J’avais peur de me faire engueuler. » Quant à son père, plus à l’aise avec ses amis du rugby qu’avec ses enfants, il peut se montrer « brutal » – dans les mots, mais pas seulement. De cette enfance, Juppé dit pourtant ne garder que des « effluves de bonheur ». Même si Paris, où il arrive à 17 ans, pour faire Normale-Sup et l’ENA, lui apporte un « souffle de liberté » et une promesse de « prestige ». « J’aime être reconnu, ça m’a mû », admet-il.

Jacques Chirac, en le recrutant en 1976 comme plume à Matignon, change sa destinée ; ils ne se sont jamais quittés. La veille de la mort de l’ancien président de la République, il y a quatre ans, Juppé a passé un moment seul avec lui, au pied de son lit. Voyant défiler toutes ces années passées à ses côtés, à la Mairie de Paris, au RPR puis à l’UMP, comme premier ministre enfin, entre 1995 et la dissolution ratée de 1997. Les deux hommes n’avaient rien en commun. Mais Juppé a aimé « l’énergie » folle et la « chaleur humaine » de son aîné, ses « petits mensonges » aussi. « La confiance entre nous était réciproque, vante-t-il. Il n’y a jamais eu de failles, ce qui, en politique, est quasiment sans exemple. »

Il vous reste 76.34% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

source

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 Comments
scroll to top