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« Derrière la déconfiture de Wilko se dessine la désertification des centres-villes »

Un magasin Wilko à Altrincham, près de Manchester, dans le nord-ouest de l’Angleterre, le 11 septembre 2023.

Du début à la fin, ce fut une histoire de famille dans l’Angleterre profonde. En 1930, James Kemsey Wilkinson ouvre son premier magasin avec sa fiancée, Mary Cooper, au 151 Charnwood Street, à Leicester, dans les Midlands. En 1939, ils avaient déjà huit autres boutiques. En 2023, la firme, présidée par la petite-fille de James et Mary, en possédait 400 dans tout le Royaume-Uni.

En octobre, elles auront toutes fermé, laissant près de 12 500 employés sur le carreau. Rebaptisées Wilko en 2012, ces boutiques de centre-ville vendent des ampoules, des couvertures, des outils de bricolage, des meubles de jardin, des machines à café, du papier peint, des aquariums… Avec comme slogan « Get the good deal », trouvez la bonne affaire.

Tout ce petit monde n’a pas supporté les changements du commerce et la conjoncture désastreuse. Officiellement, l’inflation et les problèmes logistiques ont eu raison d’une société aux finances tendues. Incapable de payer les fournisseurs, la firme s’est placée début août sous la protection d’un administrateur. Très vite, ce dernier s’est convaincu que la seule porte de sortie était la vente des enseignes. Le concurrent B&M en a récupéré une cinquantaine, autant ont été fermées et un groupe canadien devait récupérer les 300 magasins restants. La négociation n’a pas abouti et tout devrait être fermé en octobre.

Les gloires de « High Street » mordent la poussière

Derrière la déconfiture de Wilko se dessine en arrière-plan la désertification des centres-villes, ce que les Américains appellent « Main Street » et les Anglais « High Street », cette rue principale, large et animée, où fourmillent les petits et les grands commerces. Avant les bazars de la famille Wilkinson, d’autres gloires de « High Street » ont mordu la poussière, comme Debenhams, la célèbre chaîne de grands magasins fondée en 1778. En 2021, tous ses magasins ont été fermés et 12 000 emplois supprimés. La marque a été rachetée par un site de vente en ligne, tout un symbole.

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Internet n’a pas été le seul responsable de la débâcle Wilko. Il a été détrôné par des magasins plus agressifs que lui sur les prix et plus éloignés des centres, comme Action ou B&M, qui se déploient sur le même créneau dans toutes les zones commerciales, y compris en France. Et puis, comme souvent dans les sociétés familiales, la petite-fille n’a pas eu le talent de son grand-père, a favorisé ses intérêts patrimoniaux en se versant de confortables dividendes, même quand les affaires ont commencé à mal tourner. Refusant de refermer le livre familial avant que la dure loi du commerce ne le fasse à sa place.

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