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L’ancien président d’EDF Marcel Boiteux, chantre du « tout-nucléaire, tout-électrique », est mort

L’ancien président d’EDF Marcel Boiteux (1979-1987), en 1980.

Quelques rares patrons laissent une empreinte presque indélébile sur l’entreprise qu’ils ont dirigée, au point de s’identifier à elle et de demeurer, des décennies après leur départ, une référence, et même un objet de révérence. Marcel Boiteux, mort à Paris le 6 septembre, à l’âge de 101 ans, était de ceux-là. Il restera « le » dirigeant historique d’Electricité de France (EDF), dont il fut directeur général de 1967 à 1979, lors du déploiement du programme électro-nucléaire, puis président jusqu’en 1987.

Né le 9 mai 1922, à Niort, dans une famille comptant polytechniciens et normaliens, il était naturellement « tombé » dans les sciences, après s’être illustré durant la seconde guerre mondiale. Après l’Ecole normale supérieure et l’agrégation de mathématique, en 1946, l’assistant de l’économiste Maurice Allais à l’Ecole des mines de Paris souhaitait poursuivre une carrière de chercheur et d’universitaire. Comme son condisciple Gérard Debreu, il postule à une bourse Rockefeller pour compléter sa formation aux Etats-Unis. Il n’y en a malheureusement qu’une et le tirage au sort favorise le futur Prix Nobel d’économie 1983. M. Boiteux restera en France.

En 1949, il entre chez EDF, créée trois ans plus tôt, à la direction des études économiques. Dans une France qui entame sa reconstruction, la nouvelle entreprise revêt alors une importance cruciale : proposer un système de tarification moderne pour de nombreux types de clients, de l’industriel électro-intensif au particulier. En 1967, Pierre Massé, ex-commissaire au Plan et président d’EDF, pousse à la nomination de M. Boiteux à la direction générale. Il signera le premier « contrat de programme » avec l’Etat actionnaire, qui lui fixe des objectifs en lui laissant une part d’autonomie pour les atteindre.

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L’une de ses missions est de développer l’énergie nucléaire, embryonnaire chez l’électricien français. Dans les années 1960, la « guerre des filières » fait rage avec le Commissariat à l’énergie atomique, et au sein même du groupe d’électricité : d’un côté, la technologie française uranium naturel-graphite-gaz, dite « UNGG » ; de l’autre, celle de l’uranium enrichi-eau pressurisée de l’entreprise américaine Westinghouse, qui a fait ses preuves outre-Atlantique. M. Boiteux est de ceux qui convainquent le général de Gaulle et son premier ministre Georges Pompidou, en 1969, d’abandonner l’UNGG au profit de la technologie américaine, moins coûteuse et plus performante.

Vision économique

Avec lui, EDF est à la fois maître d’ouvrage, maître d’œuvre et architecte ensemblier des centrales. Quand il quitte la présidence de l’entreprise après avoir piloté un programme industriel hors du commun, le parc nucléaire compte 58 réacteurs en service, en chantier ou en projet avancé. Entre-temps, il a fallu ferrailler dans un pays où la contestation antinucléaire ne cesse de s’affirmer. A tel point qu’il sera la cible, en 1977, d’un attentat à son domicile, revendiqué par un obscur Comité d’action contre les crapules atomiques.

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