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« L’affaire Médine illustre la dérive constante d’une certaine gauche face à l’antisémitisme en France »

Voici donc que l’un des principaux partis politiques de gauche, Europe Ecologie-Les Verts (EELV), vient d’accueillir dans son université d’été au Havre (Seine-Maritime) le chanteur Médine, qui s’est illustré récemment par des propos tenus dans un tweet plus que douteux concernant l’essayiste Rachel Khan, « ResKHANpée » – allusion à la déportation de ses grands-parents juifs dans les camps, pendant la seconde guerre mondiale. Dans la pratique abjecte des jeux de mots à partir d’un nom renvoyant à la mémoire de la Shoah, on pense évidemment au « Durafour crématoire » que l’ancien président du Front national, Jean-Marie Le Pen, avait lancé en 1988. Car celui de Médine, quoi qu’il en dise [le rappeur a justifié ses propos en plaidant la « maladresse »], se situe bien précisément dans cet héritage idéologique.

La politique est faite de symboles, et celui-là est désastreux : il illustre la dérive constante d’une certaine gauche face à l’antisémitisme en France, le parti La France insoumise (LFI) ayant également soutenu le chanteur Médine à la suite de la polémique créée par ce tweet.

Depuis les années 1980 et la place prise par la Shoah dans la société française (politiques mémorielles, enseignement, musées mémoriaux, productions audiovisuelles, littérature), le discours antisémite s’est notamment exprimé à travers des allusions à la Shoah. Il visait soit à en remettre en question l’existence (négationnisme, conspirationnisme), soit à en relativiser l’importance, soit à en dénoncer l’omniprésence de la mémoire et l’occultation d’autres mémoires comme celle de l’esclavage colonial, soit à en tourner en dérision les victimes et leurs descendants.

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Un combat d’éducation

Dieudonné, que Médine a soutenu pendant des années, en a aggloméré les différentes formes depuis les années 2000 entre formulations abjectes (« Shoananas »), l’invitation du négationniste Faurisson lors d’un spectacle, la dénonciation d’un « lobby juif » qui imposerait la mémoire de la Shoah et empêcherait toute production audiovisuelle sur l’esclavage colonial (lors d’une conférence de presse tenue à Alger en 2005, par exemple). La popularité de Dieudonné et de ses arguments conduit à mener un combat de formation et d’éducation contre l’antisémitisme, auprès de la jeunesse, qui engage tout représentant politique responsable.

Au tournant des années 1980-1990, la mémoire de la Shoah a eu pour fonction, dans le langage et les pratiques du personnel politique français, de conduire à une prise de position salutaire face à l’extrême droite du Front national, dont la forte mobilisation à la suite de la profanation du cimetière juif de Carpentras, en 1990, a constitué un jalon important.

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