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Elsa & Johanna, photographes et amies : « Travailler à deux nous offre une réflexivité décuplée »

Elsa & Johanna sont deux amies plasticiennes et photographes françaises. Depuis 2014, ce duo s’installe dans des territoires variés et observe, des semaines durant, les gestes, les attitudes et les relations que tissent leurs habitants. Ce travail d’immersion leur permet ensuite de forger des personnages qu’elles interprètent elles-mêmes devant l’objectif. En résultent des autoportraits fictifs à la fois singuliers et étrangement familiers.

Votre collaboration est-elle née d’une amitié, ou est-ce l’inverse qui s’est produit ?

Elsa Parra : Nous nous sommes rencontrées par hasard − nous faisions toutes les deux une année d’échange universitaire à la School of Visual Arts, une école de photographie à New York. C’était le jour de la rentrée, et ça a été un coup de foudre amical. Très vite, nous avons tout fait ensemble, dans et surtout hors de l’école. Nous sentions déjà que nous avions un terrain commun fertile du côté de l’autoportrait, mais sans savoir encore quoi en faire.

Johanna Benaïnous : Ce qui était une forme d’entente, d’entraide, est devenu une véritable collaboration quand, une fois rentrées en France, nous avons décidé de repartir tout de suite ensemble aux Etats-Unis pour un projet. Cette fois, c’était très sérieux, il s’agissait de travailler, de produire des images. Cela s’est très bien passé : voyager et vivre ensemble, dans une forme de mouvement commun, a facilité les moments de création à deux.

Justement, comment travaillez-vous à deux ?

J. B. : Nous avons dû inventer notre propre processus créatif, car quand nous avons commencé à travailler ensemble, nous n’avions pas beaucoup d’exemples de duos amicaux autour de nous. Nous avons d’abord dû développer des compétences similaires − être capables de s’habiller, de se maquiller, de se coiffer, de manipuler la lumière, de prendre la photo − pour pouvoir alternativement remplir chacun de ces rôles. C’était important, d’abord parce que nous avions peu de moyens, et ensuite parce que c’était indispensable à la construction de notre univers commun, ce « troisième œil » qui n’est ni celui d’Elsa ni le mien, mais le nôtre. Dix ans plus tard, cette identité commune existe bel et bien, et nous n’avons plus besoin d’y réfléchir : nous pouvons plus facilement séparer les tâches, et tirer profit de nos différences.

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L’amitié est-elle un sujet important dans votre travail photographique ?

E. P. : Pour notre premier projet, les personnages que nous avons créés allaient toujours par paires, et ils étaient liés par une relation fictive. Nous avons notamment beaucoup travaillé sur la thématique du temps qui passe et de la jeunesse − inévitablement, l’amitié était donc au cœur de nos narrations. Elle peut être signifiée par la gestuelle, ainsi que dans la manière d’être pris en photo : le photographe devient alors lui aussi un personnage, et l’amitié se lit dans la manière qu’a le modèle de poser.

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