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La mort de l’économiste Ignacy Sachs, pionnier des travaux sur le développement durable

Ignacy Sachs, le 21 octobre 1972.

Ignacy Sachs est né en 1927 à Varsovie, dans une famille juive contrainte de fuir la Pologne envahie par l’Allemagne nazie et l’Union soviétique, pour se réfugier d’abord en France, puis, en 1941, au Brésil. Après son baccalauréat, passé au lycée français de Sao Paulo, il entame dans ce pays des études d’économie avant de rentrer, en 1954, en Pologne, alors au début de la déstalinisation. Ses sympathies de gauche lui ouvrent l’accès au monde académique, avant qu’une affectation en Inde y ajoute l’occasion de préparer un doctorat dans la très réputée Ecole d’économie de Delhi. Il y croise notamment Amartya Sen et Gunnar Myrdal.

Ces deux séjours formeront le socle d’une pensée originale, qui prolonge un domaine déjà exploré, en Argentine, par Raul Prebisch, par Albert Hirschman, aux Etats-Unis, et par Hans Singer, au Royaume-Uni, dans des travaux largement fondés sur l’étude de la dépendance et les échanges inégaux entre économies développées et économies en développement.

Sachs tire de ses expériences de terrain une démarche propre, qui privilégie un développement échappant à la dépendance comme au mimétisme vis-à-vis des économies développées, pour s’appuyer sur les dynamiques endogènes, les coopérations Sud-Sud et le contrôle des technologies et des ressources par chaque pays concerné.

Nouvelle approche

Les violentes purges antisémites du printemps 1968 en Pologne le forcent, avec sa famille, à un nouvel exil, qui l’amène assez naturellement en France. Fernand Braudel l’y accueille à la VIe section de l’Ecole pratique des hautes études (EPHE), qui deviendra en 1975 l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), un cadre propice à la poursuite de ses travaux. Sa réputation internationale et son réseau de relations lui valent des invitations aux plus grandes conférences. Celle de Tokyo, en 1970, sur l’environnement, consécutive à l’empoisonnement au mercure de la baie de Minamata, va imposer cette question au cœur de sa réflexion sur le développement. Elle est également l’objet de la conférence de l’ONU à Stockholm, en 1972, l’année où est publié le rapport Meadows sur les limites de la croissance, commandité par le Club de Rome, qui suscite de vifs débats.

Le concept d’« écodéveloppement » préside à la création par Ignacy Sachs, dès l’année suivante, au sein de l’EPHE, d’un laboratoire, le Centre international de recherche sur l’environnement et le développement (Cired), donnant l’occasion à des chercheurs et doctorants d’investir une thématique encore peu étudiée. Le séminaire qu’il anime à l’EPHE ne désemplit pas, formant des générations d’étudiants à cette nouvelle approche, qui deviendra, à la fin des années 1980, le développement durable.

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